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Le CNM dévoile l’étude SPOT (Scénarios pour orienter la transition) et imagine l’avenir de la filière musicale

À l’occasion des Rencontres de l’Innovation et des Transitions dans la Musique qui se sont déroulées ce 3 et 4 juin à Lyon, le CNMlab – laboratoire d’idées du Centre national de la musique – a dévoilé sa première onde longue, intitulée « Scénarios pour orienter la transition (SPOT) ». Cette étude imagine l’avenir, à horizon 2050, de la filière musicale française à l’aune des changements climatiques et environnementaux. Inspirée des travaux prospectifs de l’Ademe et menée par le cabinet Ramboll, elle est le fruit d’une réflexion collective entre la recherche et le monde professionnel.

L’étude se divise en trois parties :

• Un état des lieux de l’écosystème musical face aux défis climatiques et environnementaux.
• Les scénarios d’adaptation de l’écosystème musical d’ici à 2050.
• Les principaux enjeux d’avenir pour la filière.

Les scénarios

Scénario 1 : « À bicyclette » (Yves Montand) — Frugalité

Seul le premier scénario permettrait au secteur de réaliser un effort contribuant de manière égale à la stratégie de réduction d’émissions de gaz à effet de serre. La frugalité renvoie aux transformations importantes des pratiques des spectateurs et à une plus grande intervention de l’État dans des programmes de décarbonation forte et d’adaptation, mais un désengagement relatif de ce dernier dans la conduite des politiques culturelles désormais confiées aux acteurs publics locaux. Ce faisant, c’est le scénario ayant le plus fort impact sur les métiers de la filière : il implique de facto une contraction économique pour le milieu professionnel, avec de nombreux emplois qui disparaissent.

Scénario 2 : « Come Together » (The Beatles) — Sobriété et efficacité

Le second scénario fait la part belle à une forme de décentralisation de l’activité culturelle et musicale qui se rééquilibre sur le territoire. Il permet d’éviter la contraction économique du secteur, mais il implique tout de même des tensions qui restent fortes pour l’approvisionnement en ressources biophysiques supportant le déploiement de l’économie numérique de la musique enregistrée. Il s’appuie sur une logique de décentralisation et de rééquilibrage des événements culturels sur l’ensemble du territoire.

Scénario 3 : « Computer Love » (Kraftwerk) — Polarisation et efficacité

Le troisième scénario présente les mêmes tensions que le précédent, mais ces dernières sont plus marquées, car le secteur s’appuie bien plus sur le numérique pour poursuivre sa croissance. Ici, le pari de technologies plus vertes entraîne des conséquences insidieuses pour le secteur : il induit une hausse importante des frais assurantiels et de sécurité en ce qui concerne le spectacle vivant. Cet élément, ajouté à d’autres, contribue à faire sortir une partie de la filière du secteur professionnel et aboutit à l’émergence d’une forme de contre-culture tolérée.

Scénario 4 : « Harder Better Faster Stronger » (Daft Punk) — Dominations

Dans ce quatrième et dernier scénario, l’État gère les crises climatiques par la technologie, tandis que la puissance publique se désinvestit de la politique culturelle. Cette absence de politique étatique conduit à des logiques de développement à deux niveaux, entre des acteurs qui s’agrandissent et s’occupent de l’entièreté des carrières d’artistes, et d’autres acteurs qui collectivisent leurs forces pour continuer à produire des spectacles. L’accès à la culture vivante devient un luxe et tend à être réservé à une élite.

 

Ces quatre scénarios impliquent des transformations importantes qui vont affecter à la fois les métiers de la filière et les pratiques des spectateurs et spectatrices et des auditeurs et auditrices. Les trois derniers scénarios impliquent, en outre, que le secteur de la musique s’appuie sur des efforts plus importants de la part d’autres secteurs pour compenser son impact carbone — qui resterait sinon supérieur à l’effort demandé équitablement à l’ensemble des pans de l’économie française.

Principaux enjeux prospectifs face aux défis climatiques et environnementaux

Cet exercice narratif met l’accent sur de grands enjeux à court et moyen termes, sur lesquels la filière musicale devra travailler.

Transformer l’écosystème musical et ses modèles économiques

Les logiques de développement économique, en concomitance avec la poursuite du réchauffement climatique, font apparaître la nécessité de mener un travail sur la transformation des modèles économiques. Cette étude pointe la réduction indispensable de la fragilité des infrastructures, la mutation des métiers et compétences à anticiper, et les manières de produire et de consommer à questionner.

Repenser la gouvernance de l’écosystème musical

Un autre enjeu prégnant est celui de la gouvernance de cet écosystème, pour mener à bien les transformations que le réchauffement climatique va engendrer. Pour traiter cet enjeu, il semble nécessaire de retravailler la question des cadres de gouvernance, tout en redessinant les contours du territoire et en faisant en sorte que cette transition se conjugue avec les droits culturels.

Travailler sur les imaginaires autour de la transformation

Enfin, pour parvenir à opérer ces changements, il paraît tout aussi important de traiter l’enjeu des imaginaires autour de ces transitions : en s’appuyant à la fois sur l’expérimentation pour changer les pratiques et les usages, et sur le rôle de la musique dans le changement des comportements.

 

Ces scénarios dessinent des horizons possibles qui ne sont pas si lointains. Leur but est bien de permettre l’anticipation et la prise de conscience, par les personnes œuvrant dans la filière, des transformations qui pourront affecter l’écosystème dans les années à venir. C’est un socle qui permet d’ouvrir le débat sur l’orientation que nous souhaitons donner collectivement à cette transition.

 

Découvrez l’étude complète ici !