Jazzra
Menu

Vu dans la presse. Emmanuel Négrier : « Ce sont les publics des musiques actuelles qui rajeunissent le moins »

Un article de Fabrice Gottraux.

« Auteur d’une vaste étude sur les festivals français, Emmanuel Négrier décortique la mécanique démographique des grands rendez-vous estivaux tels que Paléo, 46e édition du 18 au 23 juillet.

S’il y a un spécialiste incontournable pour analyser la population des festivals, c’est bien Emmanuel Négrier. Le directeur du Centre d’études politiques et sociales, à Montpellier, a cosigné en 2021 avec le sociologue Aurélien Djakouane une vaste étude nationale portant sur les manifestations culturelles dans tout l’Hexagone. Des musiques actuelles au classique, du théâtre au cinéma, «Festivals, territoire et société», coédité par le Ministère de la culture et les Presses de Sciences Po, propose une typologie détaillée de ces événements indissociables de la consommation culturelle telle qu’on l’observe au XXIe siècle.

Les données françaises, c’est heureux pour nous, correspondent assez justement avec les exemples suisses. Ainsi, lorsque les organisateurs de Paléo, 46e édition du 18 au 23 juillet à Nyon, constatent que la moitié du public a moins de 30 ans. Les chiffres d’Emmanuel Négrier corroborent cet aspect: les festivals pop, démontre l’étude française, sont fréquentés à 60% par les moins de 35 ans.

Trente ans, c’est l’âge médian du public à Paléo, un chiffre qui reste stable d’année en année. Cela ne vous étonne pas?

D’une manière générale, le renouvellement des festivaliers rime avec le rajeunissement. La partie du public arrivée en dernier est toujours plus jeune que le public qui est déjà venu. Ça pourrait passer pour évident, mais nous ne sommes jamais à l’abri d’une horde de retraités fondant pour la première fois sur un festival. Cela étant, que remarque-t-on? Contrairement à ce que l’on croit voir en raison d’une erreur de perspective, ce sont les publics des musiques actuelles qui rajeunissent le moins.

Mais le festivalier lambda des musiques actuelles ne reste-t-il pas le plus jeune qui soit?

Ce n’est pas tant que le public vieillisse, puisqu’on trouve dans les festivals de musiques actuelles le taux de renouvellement le plus important. Ceci notamment parce qu’on a affaire à la catégorie de manifestations la plus récente, raison aussi pour laquelle ces rendez-vous accueillent un public grandissant. Mais tout se passe comme si les «vieux» restaient. Voyons le classique, par exemple: une thèse, aujourd’hui anéantie par les données, voulait que ce public-là était constitué d’amateurs de musique en général qui, en prenant de la maturité, devenaient fans de classique. Ce n’est pas du tout le cas. Quand on aime, on reste. Ceci est vrai quel que soit le style. Le public des Rolling Stones a dépassé l’âge de la retraite, tout comme les Rolling Stones eux-mêmes. L’attachement se maintient, à une esthétique qu’on a contractée au premier âge adulte, voire à l’adolescence.

«Le public des Rolling Stones a dépassé l’âge de la retraite, tout comme les Rolling Stones eux-mêmes. L’attachement se maintient, à une esthétique qu’on a contractée au premier âge adulte, voire à l’adolescence.»

Emmanuel Négrier, chercheur en Science politiques, spécialiste des publics culturels »

Lire l’article complet ici.

 

Photo : Nyon, le 22 juillet 2022, les premiers rangs du public devant la scène Vega durant le concert de Juliette Armanet. © MAGALI GIRARDIN